Commencé en 2018 par l'autrice SORA et publié en France depuis l'été 2020 aux éditions Delcourt Tonkam, Le Jeu de la Mort est un manga mettant en scène la relation d'une jeune fille quelque peu dépressive, suicidaire et à l'estime de soi quasi inexistante et de Jin, professeur nonchalant accro à la nicotine.
Couverture du tome 1 |
Mikoto Ochiai vient de prendre son courage à deux mains et de faire une déclaration d'amour au garçon qui lui plait. Ainsi débute une histoire d'amour bien étrange entre elle et ... son professeur ? Rejeté par le premier et au comble du désespoir, celle-ci se rendra sur le toit du lycée pour mettre fin à ses jours. Non pas que ce soit le rejet en lui-même qui l'ai poussé à cet acte mais plutôt le fait de savoir que le garçon qu'elle aime se sentira mal dès qu'ils se rencontreront. Comment pourrait-elle encore vivre en sachant qu'elle fait du mal à l'être aimé ?
Bref, c'est à ce moment que Jin Haiba, professeur de physique, arrivera pour s'en griller une, sauver la fille qu'il aime et lui demander si elle n'aimerait pas, au passage, vivre une histoire d'amour avec lui. Terriblement choqué - cette déclaration venant de nulle part, surtout de la part d'un prof - cela aura au moins eu le bénéfice d'effacer ses idées noirs. Au gré des coïncidences? et rencontres, nos deux héros commenceront donc à se fréquenter - en tout bien tout honneur -, à faire connaissance ... et à s'envoyer des pics bien sentit.
Une déclaration ... rocambolesque |
Commence donc vraiment une relation - Mikoto développant rapidement des sentiments, une attirance pour son professeur - qui, si elle est taboue, ne dépassera jamais la ligne rouge. Attention, nous ne partons pas ici sur un récit où les deux personnages ne feront absolument rien mais chacun sait se tenir, sait quelles limites leur relation, pour le moment, doit avoir. Il est d'ailleurs très agréable de voir que l'évolution de leur relation influe directement sur leur proximité physique, sur les gestes que chacun se permettra envers l'autre.
Et voilà justement un autre point fort de la série. Jin est un peu pervers sur les bords ou plutôt, il est honnête avec ses désirs et ses pensées qu'il n'a pas de mal à exprimer, que ce soit à l'oral ou par des gestes. Il arrivera qu'il lui fasse un baise-main ou la prenne dans ses bras. Cependant, il n'est pas lourd ni en chien devant Mikoto. Ses gestes montre parfois son affection sincère tandis que d'autres - en plus de sa nonchalance et de ses inclinations - servent à détendre l'atmosphère ou à provoquer la jeune fille. Des provocations dont il ne ressortira jamais indemne, la jeune fille étant loin d'être passive.
Plus que du simple humour à l'intention du lecteur, ces petits échanges - qu'ils soient grivois ou non - font partie intégrante de leur relation. Une relation honnête, mêlant respect et confiance mutuel, qui leur permettra de se chercher, de se titiller sans jamais se blesser. Et cela rend vraiment leur affection, l'intérêt qu'ils se portent, crédible.
Qui aime bien, châtie bien ? |
Pour en revenir à Mikoto, elle n'est pas très causante et plutôt introverti. Sans amis, vivant quasi-seul chez son frère, elle n'est pas la fille la plus joyeuse au monde mais sait aussi faire preuve d'une belle répartit. Au contact de son professeur - qui peut-être, aussi surprenant que cela puisse paraitre, de bon conseil - nous assisteront également à une légère évolution de son personnage, prenant progressivement confiance en elle, osant plus de choses.
Les intentions que nos personnages pourront avoir envers l'autre ne sont ni forcés ni à sens unique. La jeune fille sait être active, sait mettre les holà lorsque ce n'est pas le moment ou que son professeur devient un peu lourd ou indiscret. Mais d'un autre côté, elle aussi se laisse parfois allé à quelque marque d'affection, parfois même plus poussé que ce que Jin ne s'autorise lui-même à faire. C'est efficace sans aller trop vite si bien qu'en deux tomes seulement, leur relation nous apparais sincère et bridé uniquement par le fait qu'elle soit tabou.
Et ça, Mikoto en est affreusement consciente - même s'ils ne font encore rien dans ces deux premiers tomes - et essaye en conséquence de garder une certaine distance avec son professeur. Elle a accepté cette relation et les marques d'affections de son professeur ne la gênent en pas en eux-mêmes mais son manque de discrétion pourrait lui porter préjudice. S'ils venaient à être découvert, cette relation, consentit, causerait des problèmes à Jin. Et ça, elle veut à tout prix l'éviter.
C'est sans doute ce qui différencie cette œuvre d'une banale comédie romantique ou de ces œuvres jouant la carte du tabou à fond jusqu'à en être malsain. Ici, ce n'est pas un obstacle, ni pour l'un ni pour l'autre, à la relation en elle-même, juste à sa publicisation. Et surtout, il ne sert pas à provoquer des scènes scandaleusement croustillante. On en joue, certes, mais on n'en abuse pas.
Niveau structure, chaque chapitre sera l'occasion d'un nouveau contexte, d'une petite intrigue. Ils commenceront tous par une allusion à la mort ou au suicide - Mikoto ayant déjà tenté de se suicider et Jin ayant un étrange attrait pour la mort et les moyens de mourir - mais, si un thème aussi lourd est omniprésent, l'autrice n'en fait pas non plus des caisses. On ne tombe jamais dans le pathos et ce thème et parfois même utilisé pour renvoyer à la vie, comme en miroir.
Au niveau des événements, il y a du classique - la préparation du festival scolaire, le festival des sports, la St-Valentin - mais surtout de l'informel. Trop de romances ont tendance à mettre en avant les événements cité plus haut pour provoquer de grands avancement dans la relation des protagonistes, mais ils sont ici utilisé avec parcimonie. De nombreuse scène se passe durant de petits moments anodins, dont l'importance serait normalement toute relative. Certaines se passent également en extérieur ce qui nous permet de nous détacher de l'école, de les voir vivre leur relation en dehors du cadre scolaire.
Ajouté à cela quelque personnage secondaire pour varier le tout (des amis de Jin - des adultes donc - rapidement mis au fait de leur relation. Un jeune homme tout aussi solitaire que Mikoto - pour différentes raisons - avec qui elle se liera finalement d'amitié) et vous obtenez une histoire très sympathique à suivre, avec son lot de questionnements, de recherche de soi, mais également d'humour et de relative bonne humeur
Alors ? On lit ou pas ?
Si les gestes de Jin ne franchissent jamais la ligne rouge, certains, selon leur sensibilité, pourront trouver cela trop cringe pour continuer. Ce serait compréhensible. Cependant, si vous avez une certaine tolérance envers les romances tabous, bien construite et qui ne tombe pas dans la facilité alors ce titre sera susceptible de vous plaire.
Sans être exempt de défaut, le titre montre de belle qualité tant narrative que visuelle. L'histoire se suis bien et réussit, pour qui aime le tranche de vie et les relations prenant le temps de se construire, à retenir notre intérêt. Les personnages ont une certaine profondeur et leur design est, je trouve, vraiment charmant. Leurs expressions faciales, entres autres, sont très réussis qu'ils soient joyeux, incrédules, embarrassés. Ils sont adorables.
Vraiment, ils sont adorables |
En résumé, une bonne petite découverte qui, si elle ne plaira pas à tout le monde, ne devrai pas avoir de mal à se trouver une place chez plus de personnes encore. Il ne reste plus qu'à espérer que l'autrice saura garder ce cap, naviguant habilement entre interdit, désirs, respect et amour. Hâte de lire la suite