Faisant partie de la 1ère première vague de sortie de la nouvelle collection Shojo+ des éditions Glénat, Alter Ego à pour lui la particularité d'être non seulement un yuri, une romance lesbienne donc, mais aussi un global manga d'origine espagnol. Deux premières fois pour le prix d'un titre, Glénat commence très fort sa nouvelle collection !
Se déroulant dans une ville inconnue - occidentale au vu du nom de ses protagonistes -, l'histoire nous entraine aux côtés de Noêl, jeune fille plutôt solitaire uniquement proche de sa meilleure amie, Elena, pour laquelle elle éprouve bien plus que de la simple amitié. Cependant, sachant que ses sentiments ne seraient jamais retournés, celle-ci se tait jusqu'à ce que ce qu'elle craignait le plus n'arrive : Elena s'est trouvé un petit-ami. Et pour ne rien arranger, sa meilleure amie lui annonce que June, une amie qu'elle a rencontré en ligne, vient s'installer en ville.
Pour Noel, c'en est trop. Le cœur brisé et risquant, en prime, de perdre sa place de meilleure amie, sa colère est sur le point d'exploser. Mais, qui sait ? Ne dit-on pas que la haine et l'amour ne sont que les deux face d'une même pièce ?
Étant un one-shot, difficile d'en dire plus s'en spoiler, même si on se doute bien de la fin. Par contre, il y encore beaucoup à dire sur l'œuvre et sa construction.
Ses personnages, d'abord, sont loin des poncifs habituels du genre " manga de romance typé shojo". On se rend très vite compte, en lisant Alter Ego, que ce n'est pas japonais. Le caractère des personnages, leurs réactions et l'expression de leurs sentiments font très occidentale et change complétement la façon d'aborder cette histoire.
Noël, par exemple, à un caractère bien trempé, prompt à monter dans les tours avant de regretter ce qu'elle a dit sous le coup de la colère. On connait tous ce genre de personnes et cela nous la rend donc très proche, très vrai sans pour autant nous la rendre aimable.
Car, disons-le, Noël est un peu chiante, un peu antipathique. Il est difficile de vraiment l'aimer mais c'est justement, à mon sens, son point fort : c'est un personnage avec de gros défauts, qui en est consciente, et qui fait de son mieux pour devenir une meilleure version d'elle-même. Alors, même si on ne l'aime pas, on l'apprécie, elle, ses efforts, ses doutes.
Les autres personnages peuvent paraitre plus lisse mais, comme pour Noël, plus l'historie avance plus leurs défauts ou cachoteries sont révélés - sauf pour monsieur le petit-ami qui joue un peu le rôle de figurant.
Le tout donne un récit fort sympathique sur la découverte de l'autre, le changement des sentiments, l'acceptation, l'amitié et, bien-sûr, l'amour.
La romance d'ailleurs, parlons-en. Après tout, c'est un peu l'objectif principal de l'histoire. Ici, pas de jeu de séduction. Noël et June passent de l'antipathie réciproque à une acceptation mutuelle avant de commencer à éprouver de l'attirance l'une pour l'autre. One-shot oblige, ça va vite. Un peu trop même. J'aurais apprécié que l'évolution de leurs sentiments, que leur apprivoisement mutuel, soit un peu plus long pour vraiment pouvoir y croire, pour être véritablement touché.
À part ça, par contre, leur historie est très sympathique. La jalousie, les non-dits qui peuvent blesser sans oublié les phases plus douces sont intéressante et, encore une fois, raconté de manière un peu différente de ce que l'on connait. C'est frais et j'aimerai beaucoup revoir ça dans de futures publications.
Par contre, les personnages imposent parfois leur propre vision de la vie à leur interlocuteur comme si c'était une vérité universelle et cela m'a assez déplu. Pas tant dans l'expression de leur vision, bien-sûr, mais par le fait que l'interlocuteur accepte cette vision comme étant juste, comme étant la bonne façon de voir les choses même si cela lui déplait. Il n'y a pas de réflexion sur sa propre façon de voir les choses ni de confrontations avec celle des autres pour arriver à sa propre conclusion. En conséquence, on a l'impression que l'autrice nous dévoile sa vérité par l'intermédiaire de ses personnages, simple messager, alors que cette réflexion devrait être la leur.
Enfin, parlons un peu des chara-design, eux aussi très occidentales, plein de personnalité. La mangaka tape juste, c'est beau et les différends vêtements qu'elle fait porter à ces protagonistes sont un véritable plus (mention spéciale au pyjama de Noël que je trouve beaucoup trop stylé). Par contre, j'ai eu la sensation que les visages était parfois un peu figé
Alors ? On lit ou pas ?
Alter Ego fut une lecture bien agréable. Son historie est jolie, ses personnages sont séduisants et l'atmosphère qui se dégage de l'œuvre, fort intrigante.
Malheureusement, c'est un one-shot. D'une part, j'aurais aimé voir la suite de l'histoire entre Noël et June et de l'autre, étaler l'historie sur 3 ou 4 tomes aurait permis de fluidifier certains passages tout en approfondissant les quelques thématiques abordés dans l'ouvrage.
Ce n'est bien-sûr pas rédhibitoire et, au contraire, je conseille fortement cet ouvrage pour tous les types de lecteur. Avec sa sensibilité européenne, ce manga pourra plaire à ceux qui évitent ces "japoniaiserie" tandis que ceux intrigué par les "global manga" ou le Yuri y trouverons une porte d'accès tout en douceur.
Bref, malgré quelques défauts, Alter Ego a le potentiel de plaire à un large public et vous fera passer un bien agréable moment.